Deuxième jour de notre week-end au Brassus. Cette fois, nous montons directement à la frontière que nous longeons sur plusieurs kilomètres. Nous y trouvons des bornes, certaines très anciennes décorées de fleurs de lys, d’autres plus récentes, de simples blocs de béton. L’arrivée sur la Grand Tèpe nous offre une magnifique vue sur la vallée.
Nous avons regretté notre pizza fromagère. Ses 2’000 calories (au moins) ont rendu notre nuit difficile et agitée. Vers une heure du matin, Stefano, malgré ses Boules Quies, pestait contre un ronfleur dans une chambre voisine. Jusqu’au moment où il s’est rendu compte que le ronfleur était une ronfleuse, et qu’elle était allongée à quelques centimètres de lui. C’est dire !
A 7h30 nous sommes dans la salle du petit déjeuner, censée ouvrir à 8h. Avec la bénédiction du maître des lieux, nous y trouvons tous ce que nous souhaitons. Et filons lorsque un groupe de motards arrive, collés les uns contre les autres, sans masque évidemment. Bien joué, les Two Swiss Hikers.
Notre balade du jour commence par le même chemin que le retour de celle d’hier. Nous passons à proximité de La Thomassette où un berger arrache les chardons du pré. Eh oui, les dimanches n’existent pas pour les braves.
Suivant la route, nous passons ainsi par le refuge de La Pierre à Pointe à la porte, dessinée d’une fleur d’hibiscus (je crois).
L’air est plus chaud qu’hier mais la température reste agréable.
Le second refuge est le refuge Pillichody, peut-être dédié à Albert Pillichody (1866-1936), ingénieur forestier de la commune du Chenit et écrivain ? Qui qu’il en soit, le refuge est très récent ou il a été restauré ces dernières années.
A quelques dizaines de mètres de la frontière, nous nous arrêtons au refuge du Rendez-vous des Sages.
Celui-ci a une histoire, et pas des moindres. C’était un lieu de rendez-vous entre les résistants, français et suisses. Voici le texte trouvé, placardé sur un mur du refuge.
Le Rendez-vous des Sages
Vous êtes ici dans un lieu de … sagesse. C’est dans ce chalet de montagne que Fred Reymond et les Passeurs chapelands ( N.D.L.R. : de la Chapelle-Des-Bois) se retrouvaient.
Les rendez-vous permettaient aux Français et aux Suisse de faire moins de chemin, chacun de leur côté.
Les Juifs qui voulaient trouver refuge en Suisse étaient conduits de la Combe-des-Cives au chalet. Les passeurs leur indiquaient le chemin de la Thomassette qui les conduisait à la gare du Brassus.
Les résistants reconnus par le service de renseignement suisse étaient conduits, eux, jusque chez Fred, au Sentier. Là ils étaient pris en charge par le « Lieutenant Corday », de son vrai nom Jacquerot, et qui habitait Yverdon.
Le passe par le Rendez-vous des Sages fut l’un des plus empruntés pendant la guerre.
Le nom de ce refuge vient-il de la légendaire « sagesse » des gens de la montagne ? Pourquoi ne pas le croire. Les « Sages » de la dernière guerre y ont fait de toute façon de nombreux passages et séjours.
Nous nous imprégnons un moment de la sagesse du lieu et discutons brièvement avec un couple de Genolier, qui découvre, comme nous la région.
Des petits cailloux peints, déposés sur le tas de bois, devant le refuge.
Quelques mètres plus loin, nous sommes à la frontière mais restons du côté suisse.
A droite du mur, la Suisse, à gauche, la France.
De vieilles bornes, marqués de la fleur de lys côté français et des lettres « LP » (pour Liberté et Patrie), accompagnent le mur.
Nous arrivons à un petit chalet aux volets peints d’un rouge joyeux.
La porte est ouverte et nous appelons son occupant. Nous avons arrêté d’être timides et cherchons, mais sans jamais forcer, le contact. Il y a toujours des belles histoires ou anecdotes à glaner.
Un monsieur d’un age certain en sort, avec une belle chevelure argentée. C’est Monsieur Capt, du même nom que le chalet vu hier, mais pas de la même famille nous assure-t-il avec véhémence. Il nous parle d’une randonnée annuelle, organisée par une société locale, qui retrace le chemin des passeurs. Il nous dit que quelque part, dans la forêt du Risoud, non loin, il y a une borne avec des inscriptions espagnoles. Car oui, ce n’est en 1678 que le Comté de Bourgogne est rattaché définitivement à la France.
La prochaine borne porte l’aigle de Napoléon, comme annoncé par Monsieur Capt.
La suivante est plus ancienne (1824).
Suivant les conseils de Monsieur Capt, nous passons voir le chalet privé, Le Chevreuil, datant de 1934. Lui aussi a dû en voir des choses…
Encore une borne. Cette fois nous sommes en France.
Nous arrivons à un passage de frontière « officiel », le Chemin des Auberts.
Attention, ça ne rigole pas !
Mais nous restons côté français, afin de pousser jusqu’à La Jaique, aussi appelé la Grande Landoz. Où nous rencontrons une adorable petite vache grise qui ne veut pas nous laisser partir et quémande des caresses.
Nous re-traversons la frontière, re-croisons les randonneurs de Genolier aperçus ce matin au Rendez-vous des Sages et arrivons au refuge de La Marocaine, tout petit mais très élégant.
Une belle piste forestière…
nous amène à un chalet privé, le Gai Réveil…
pour finalement nous mener au refuge du Poste des Mines.
Tout comme le Chalet Capt, le Poste des Mines est une ancienne gendarmerie. Les lieux sont occupés et six chevaux dorment, à l’ombre des arbres. Nous retrouvons un groupe de personnes en train de manger, ainsi que le cavalier que nous avions vu il y a quelques mois au Petit Croset. Après avoir échangé quelques mots, nous sommes invités à visiter l’intérieur puis à aller voir, non loin, des vestiges de mines. Bon, c’est un peu la déception car nous n’y trouvons que des pâturages à l’abandon, des trous et une vieille borne.
Parce qu’il est trop tôt pour commencer le retour, nous continuons notre périple le long de la frontière.
Nous y trouvons d’autres refuges : La Sauvageonne (ci-dessous), Les Fougères …
et La Kennedy, très élégante comme une dame de la bonne société.
C’est à partir de là que nous commençons la descente vers Le Brassus. Nous sommes au kilomètre 17.
Nous arrivons sur le pâturage de Grande Tèpe où la vue sur le lac de Joux et les crêtes du Mont Tendre est aussi imprenable que magnifique.
Le chalet Grande Tèpe, où les vaches nous regardent, indolentes.
Nous n’en avons pas fini avec les refuges. Voici le refuge de La Christine, qui remporte la palme du plus beau refuge de notre week-end.
A l’intérieur, une feuille punaisée contre le mur dit ceci :
Groupe Secours Jura Vaudois
Promeneurs, vous qui parcourez notre magnifique région merci de respecter ce refuge.
Pour nous, il est un précieux point de repère lors de recherches d’une éventuelle personne disparue.
Si lors d’une randonnée un de vos proches devait s’égarer, faite le savoir rapidement au n° tel 117.
Nous viendrons, s’il le faut, effectuer des recherches, 24h sur 24h.
Cette boîte contient aussi de quoi vous informer et vous dépanner.
Nous vous souhaitons d’agréables moments dans la nature.
Groupe Secours Jura Vaudois – B.P. – 1261 Cheserex.
Le voici de profil. Nous aimons bien ces murs en rondins.
Un peu plus loin, c’est celui de La Girouette.
Puis, le refuge de l’ONU.
Plutôt que de suivre la route qui descend vers Le Solliat, nous choisissons de partir par le Chemin à l’Ours.
En arrivant au pâturage de La Capitaine, Stefano, qui a aperçu un bâtiment entre les arbres, me dit : tu as vu la construction futuriste ? Heu non, je n’ai rien vu. En fait de construction futuriste, il s’agit d’un observatoire, L’Astroval.
Il est délicieusement décalé, au milieu des vaches qui paissent.
Nous descendons encore et toujours jusqu’à arriver à un lieu dit Chez le Christ. Ça ne s’invente pas !
Il ne nous reste plus qu’à suivre la route sur 4 km et des poussières pour rejoindre la voiture. Nous y sommes à 6h24, soit 9h36 après l’avoir quittée pour une boucle de quelques 31.7 km.
Hum, qui va bien dormir cette nuit et qui est content de retourner au travail pour se reposer ? C’est nous !
Itinéraire du billet
C’est ici et c’est chez Suisse Mobile.
Autoportraits du jour
Près du refuge de La Christine.