Capanna Cristallina – Passo del Náret

Depuis quelques années déjà, la capanna Cristallina attise notre curiosité. Déjà en 2021, nous avions rencontré une famille en route pour la cabane. Puis, cet hiver, nombreux étaient les amateurs de peau de phoque partant d’Osasco pour la rejoindre. Enfin, à l’occasion de nombreuses balades sur le flanc sud du val Bedretto, nous avons pu admirer le val Torta, fermé par le passo di Cristallina où est juchée la cabane.

A 9h35, nous sommes à Osasco et Stefano démarre le logger. Pourquoi si tôt ? Car notre objectif du jour inclut la capanna Cristallina et le passo del Náret. L’application Suisse Mobile, avec laquelle Stefano a dessiné le tracé indique un peu plus de 1500 mètres de dénivelé et un peu moins de 8 heures de marche auxquelles il faut ajouter les pauses, tant pour la nutrition que pour la prise de photos.

Après une courte montée entre un pâturage à droite et le ri di Cristallina à gauche, deux grandes traversées nous amènent à la première jonction où les indications de temps fournies par le panneau sont un peu contradictoires. D’après la carte, la capanna Cristallina est située sur le col éponyme. Avant 1999, elle était située bien avant le col, sur le plateau en contrebas et donc le temps nécessaire pour y accéder était inférieur à celui requis pour atteindre le col. D’où vient cette différence de 25 minutes ? Mystère et boule de gomme !

Quelques minutes ensuite suffisent à rejoindre la piste qui permet aux véhicules d’arriver à l’alpe Cristallina. Nous ignorons les sentiers qui coupent les virages, préférant le confort de la route, sa largeur nous permettant de marcher de front et sa faible déclivité de tenir une conversation sans être essoufflés. L’air se réchauffe maintenant que l’ombre de la forêt n’est plus là pour nous protéger.

Après 3 km de piste, la présence du rumex s’intensifie. L’alpe Cristallina ne devrait plus être loin. Effectivement, au détour d’une courbe, apparaît une construction oblongue et basse, entourée de terre martelée par les sabots du bétail.

C’est ici que se détache le sentier qui s’enfonce dans le val Torta, cette magnifique vallée parcourue par le ri di Cristallina, bordée à l’ouest par le pizzo Folcra et le pizzo Gararesc et à l’est par le pizzo Sella, il Madone et le pizzo Náret. Plusieurs cols permettent de sortir de cette vallée, dont le passo Cristallina et le passo del Náret, qui, fort à propos, sont les deux objectifs du jour. Cette vallée, nous l’avons maintes fois admirée, été comme hiver, lors de nos balades sur le versant sud du val Bedretto.

Ici, les temps indiqués sur les panneaux sont plus cohérents. Deux heures et dix minutes pour rallier et la cabane et le col.

Le val Torta est constitué d’une succession de trois paliers. J’aime ce type de relief, car il permet de morceler l’effort. Entre le premier et le second palier, un long replat offre un bon moment de récupération.

Derrière nous, le pizzo Lucendro et le passo di Cavanna, où nous étions il y a quelques jours seulement (voir billet Passo di Cavanna).

(sens contraire de la marche)

Le terrain est varié, entre sente étroite de terre coincée entre deux pans de prairie ou rocher à nu offrant une belle accroche. Entre deux, des cailloux et quelques passages où il faut lever le genou très haut pour progresser.

Sur la photo ci-dessous, derrière moi (enfin derrière la tache orange et bleue), le pizzo Folcra.

(sens contraire de la marche)

Suivant fidèlement le relief, le ri di Cristallina est tantôt un ruisseau calme, tantôt un torrent impétueux, sautant de rocher en rocher, parfois prisonnier de deux parois étroites.

Mario Leonardi était le gardien de la capanna Cristallina, emporté tragiquement par une avalanche, le 28 avril 1964. Avec une épaisseur de neige déposée dans le cône de l’avalanche allant jusqu’à 14 mètres, son corps ne fut retrouvé que onze jours plus tard, à la veille de l’abandon des recherches. Les recherches furent menées par la colonne de sauvetage alpin d’Airolo, des volontaires et des militaires.

Nous venons de franchir le dernier palier. Devant nous s’étale un vaste pâturage, marqué par cet insolite tourniquet dont l’utilité reste énigmatique.

Confortablement installées dans de l’herbe bien verte et touffue, à proximité de l’eau claire et fraîche, cinq vaches indolentes nous contemplent. Elles semblent être les seules occupantes de l’endroit.

Nous pouvons maintenant contempler le fond de la vallée. Stefano tend le doigt vers un pylône, perché sur la crête et m’explique : tu vois, à gauche du pylône, c’est le passo del Náret. Je distingue effectivement, dans un pierrier, une balafre oblique qui pourrait bien être le sentier qui y conduit. A droite, continue Stefano, se trouve le passo di Cristallina. Nous le verrons bientôt, sitôt que nous aurons pris un peu de hauteur.

Effectivement, après avoir contourné une butte, nous apercevons le passo di Cristallina et perché, un petit rectangle noir que nous devinons être la cabane.

Le sentier passe au pied de falaises et au milieu de pierriers. Je regrette de ne pas avoir attaché nos casques au sac à dos. Un petit caillou se détachant quelques mètres plus haut peut faire des dégâts, quand bien même la probabilité s’avère faible.

Le terrain est ludique et la taille de la cabane grandit à vue d’œil. Un dernier raidillon, dans un pierrier, nous amène à son niveau.

L’hélicoptère que nous avons vu aller et venir s’est arrêté là et s’apprête à repartir.

Achevé durant les 8 mois des étés 2001-2002, le bâtiment remplace la cabane précédente, construite en 1939, et détruite par une série d’avalanches. Conçue pour accueillir jusqu’à 120 personnes, la capanna Cristallina est également ouverte en hiver.

Côté sud, nous contemplons les restes du glacier Basòdino, au pied duquel nous nous sommes promenés il y a quelques années (voir billet Glacier du Basòdino).

Il est 13h30. D’un commun accord, nous nous remettons en marche sans trop traîner. Stefano a beau me dire que le passo del Náret n’est pas un passage obligé, moi, j’y tiens. D’autant qu’aujourd’hui l’effort est facile.

La variante de sentier prise à l’aller nous a fait rater ce beau petit lac.

En consultant après coup le tracé, lors de la rédaction de ce billet, nous réalisons que nous ne sommes qu’à une cinquantaine de mètres de l’emplacement de l’ancienne cabane.  Tout comme ce petit abri aux fenêtres cassées.

Un peu après, nous attrapons le sentier qui monte vers le passo del Náret.

Nous marchons lentement à longues enjambées. C’est le rythme et le mode adoptés depuis ce matin, qui me permettent de garder une fréquence cardiaque relativement basse.

Ici, un petit passage qui nécessite un peu de scrambling, pour mon plus grand bonheur. Ce sera bien le seul, d’ailleurs (de scrambling, pas de bonheur !)

Le val Torta, vu depuis le sentier.

Une petite série de zigzags nous propulsent au col. Et là, les craintes de Stefano s’envolent. Depuis un moment, nous rigolions quant au fait que, depuis le col, le lago di Náret ne serait peut-être pas visible, rendant notre détour ici inutile. S’en suivrait, bien évidemment, une série de sévices, dont une assiette vide au dîner, ou, pire encore, contenant du pain moisi. Non, point de régime forcé, le lac est là, dominé par le pizzo del Lago Scuro. Il y a même une petite croix composée de deux bouts de bois blanchis accrochés ensemble par une sangle de sac à dos.

Le ciel, si bleu ce matin, commence à se couvrir, confirmant bien que les prochains jours seront pluvieux.

Contents, ravis même, nous faisons demi-tour et entamons le retour.

A quelques mètres du col, nous croisons un randonneur solitaire, puis, quelques minutes plus tard, alors que celui-ci a disparu, un gosse d’une douzaine d’années, tout seul, cavalant. Ne voyant personne le suivre, nous en concluons qu’il tente de rattraper l’adulte rencontré précédemment. Révoltant !

A environ la moitié de la traversée qui coupe le flanc du pizzo del Náret, un sentier part sur la droite, descendant directement vers le fond du val Torta.

(sens contraire de la marche)

Après une vingtaine de minutes, nous sommes au bord du ri di Cristallina.

Nous venons de ce petit « v », sur la droite.

Nous rejoignons nos traces du matin. Le bétail s’est déplacé de quelques mètres seulement. Certes, les bêtes ont dû monter ici à la force de leur pattes mais le fait de passer tout l’été ici est une belle récompense.

Nous descendons un premier palier. Le ri di Cristallina est plus tumultueux.

(sens contraire de la marche)

Sur le replat entre deux paliers, une zone d’eau plus profonde me tend les bras. J’y fais un petit bain éclair, me cramponnant à une pierre pour ne pas être emportée, juste le temps que l’eau rende mes clavicules – qui font office de thermomètre – douloureuses. C’est si bon !

Les bâtiments de l’alpe di Cristallina.

Pour la dernière section de notre balade, nous coupons par le sentier pour éviter les 3 km de piste. C’est un peu plus raide, certes, moins confortable, mais tellement plus efficace !

Ces raccourcis nous permettent d’arriver à la voiture à 18h15, nous laissant le temps de passer à la Coop avant qu’elle ne ferme, notamment pour acheter des cacahuètes pour accompagner la bière sans alcool de l’apéro que nous ne manquerons pas de prendre. Ceci, bien sûr, afin de fêter notre première venue à la capanna Cristallina.

Itinéraire du jour

C’est ici et c’est chez Suisse Mobile.

Autoportraits du jour

A la capanna Cristallina.

Au passo del Náret avec, au fond, le lago del Náret.

Au même endroit !

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À propos de Marie-Catherine

Randonneuse, blogueuse et photographe amateur chez Two Swiss Hikers.

En phase de préparation de voyage, je m'occupe du choix voire de l'achat du matos et organise les bagages. Ma principale activité consiste à me réjouir des vacances qui arrivent ! Je deviens plus active au retour : il faut trier les photos (et des photos, il y en a...) et rédiger les billets de ce blog.

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