Nous avons découvert Somprei – le sommet des prés – il y a quelques semaines par un sentier que nous avons adoré. Non loin de cet alpage, encore un peu plus haut, un autre alpage, celui de Chièra qui, aujourd’hui, n’accueille plus que quelques génisses, veaux et moutons durant le mois d’août uniquement. Mais plus qu’un alpage, le plateau est une zone marécageuse protégée au niveau national que nous avons décidé d’explorer aujourd’hui.
Samedi. Jour de congé. Mais comment, me direz-vous. N’êtes-vous pas d’heureux retraités ? Si si, mais en semaine, les ouvriers se succèdent pour terminer cette maison qui ne semble jamais finie. Les imprévus s’enchaînent, rallongeant de semaine en semaine notre contrainte d’être présents à la maison, coincés sans pouvoir bouger. Hier, vendredi, le soleil a brillé sans interruption du matin au soir, un petit vent frais tempérant l’atmosphère. Mais des cadres de porte devaient être mastiqués. Aujourd’hui, l’application météo de Stefano promet 6 heures de soleil tandis que la mienne, plus généreuse, en promet 8.
Nous partons donc confiants, nos sacs à dos allégés des goretex, mais contenant néanmoins les 10 essentials, non négociables.
Nous laissons la voiture sur la place du village de Lurengo, où 6 à 7 voitures peuvent se garer. Nous sommes les cinquièmes. Un enfant d’une dizaine d’année s’entraîne avec une balle de tennis et une crosse. C’est qu’ici, dans la région, le hockey sur glace est LE sport et chaque enfant rêve, plus ou moins secrètement, de faire un jour partie de l’équipe élite de Suisse, l’équipe de Ambri-Piotta.
Outre les places de parking, un arrêt pour la navette postale et une fontaine.
La première partie de la balade est familière. Nous avons parcouru ce sentier il y a quelques semaines, en montant à Somprei (voir le billet Somprei – 2025). Au lieu-dit Cassina di Catto, une chaise invite au repos et à la contemplation.
Point de méditation possible aujourd’hui, par contre. A l’habituel bourdonnement de l’autoroute s’ajouter le vrombissement des moteurs de motos. La piste de l’aérodrome de Ambri s’est transformée en circuit de motos pour la seconde étape du championnat suisse de Supermoto. Mais qu’est-ce que cette discipline ? En voici une description tirée du site Swissmoto :
Supermoto en Suisse – L’asphalte rencontre le tout-terrain!
Vivez des duels palpitants et des dérives spectaculaires sur des circuits permanents et des parcours spécialement conçus! Le Supermoto combine le meilleur de l’asphalte et du terrain naturel (80% – 20%) – avec des transitions impressionnantes entre des passages tout-terrain glissants et des sprints rapides sur asphalte. Un pur adrénaline pour les pilotes et les spectateurs!
A l’heure où le bilan carbone de la Suisse est catastrophique, on pourrait se questionner sur le bien-fondé d’une telle compétition. Mais bon, l’heure n’est pas à la polémique !
La source du Riell jaillissant de la roche, à Cassina.
L’endroit est magique, le vert tendre des jeunes aiguilles de mélèzes ajoutant une note fluorescente.
Avant que ne commence la longue traversée qui mène à Somprei, il faut gagner de la hauteur. J’avais oublié ce détail ! Mais le terrain est ludique, me faisant oublier l’effort à fournir.
A Boscaiöu, nous partons à l’aventure. Au lieu de poursuivre vers Somprei, nous bifurquons sur la gauche. Le sentier nous élève doucement dans la forêt en deux longues traversées. Ici encore, le terrain est agréable, recouvert d’aiguilles de mélèzes et de pommes de pins, entre racines et rochers.
Parfois la forêt s’ouvre quelques mètres sur une prairie mais les arbres autour ne nous permettent aucune visibilité.
Au lieu-dit Padsass, une nouvelle bifurcation. Cette fois la destination Chièra est indiquée.
Depuis le sentier, Stefano remarque un point bleu, un peu en contrebas. C’est une stèle, en hommage à montagnard, un amoureux des sommets, à la vue des photos souvenirs.
La forêt se disperse et la pente que nous traversons se raidit.
Nous sommes en contrebas d’une falaise. Nous nous demandons bien comment nous allons pouvoir la franchir. Un petit replat et un banc permettent d’admirer la vue.
Je n’hésite pas à profiter de l’offre.
Les anciens savaient et étaient pleins de ressources, affirme Stefano. Et il a raison. Ils ont su trouver un passage au milieu des rochers de la falaise.
En débouchant sur le plateau, un panneau annonce Alpe di Chièra.
Les arbres rétrécissent et s’éparpillent.
Le plateau qui s’ouvre devant nous s’appelle Nei Pini – dans les pins -. Ici nous sommes sur le territoire des aroles. Ils dépassent rarement le mètre cinquante. Nous sommes à plus de 2’000 mètres et la neige refait son apparition.
En parlant d’apparition, celle du soleil est complètement absente. Mais où sont donc les 6 heures d’ensoleillement promises à Stefano ? Si la montée nous a tenu réchauffés maintenant que l’effort est terminé, nous frissonnons sous le vent froid qu’aucun rayon ne vient réchauffer. « Arnaque ! », disons-nous à l’unisson.
Le plateau Nei Pini est immense. Une prairie jaune, infinie, entrecoupée de petits rus et de rochers émergeants.
Après environ 1.5 km, nous apercevons l’étable de l’alpe Chièra. Nous en faisons trois fois le tour pour trouver un abri au vent qui semble venir de tous les côtés.
Au départ, l’idée de monter voir les lacs – laghi Chièra – avait traversé la tête de Stefano. Ils ne sont pas loin, 1 heure à peine. Mais l’absence de soleil et les pans enneigés du Pécian nous découragent.
Nous nous réfugions derrière un mur de pierres sèches pour le casse-croûte. Je m’assieds sur une motte d’herbe qui se révèle, quelques minutes plus tard, être une fourmilière. Je m’en rends compte après avoir chassé une, puis deux puis dix fourmis de mes cuisses et de mes bras.
Nous repartons en direction de Somprei par un large chemin que le bétail empruntait ou peut-être emprunte encore pour monter ici, à Chièra.
Une petite vierge, ramenée tout droit de Lourdes, si l’on en croit l’inscription sur le bout de papier enveloppé de plastique posé à côté.
Le froid se fait plus vif et je n’hésite pas à enfiler la doudoune, me coiffer d’un bonnet et à protéger mes mains avec des gants que Stefano, grand divinateur, avait glissés dans son sac à dos.
De large, le sentier se rétrécit et nous avons de la peine à imaginer les vaches passant ici. Nous n’envions pas les deux cyclistes sur leur VTT électriques, poussant leur monture, que nous croisons sur un passage particulièrement escarpé.
Passage du ri di Vigéira.
A Somprei, un seul canal de cheminée laisse échapper de la fumée.
Nous suivrons le sentier que nous avions pris pour venir ici, lors de notre première visite.
La descente commence dans le pré, où nous essayons de suivre fidèlement le sentier, ce qui n’est pas tache facile.
Il se perd souvent dans l’herbe et certaines sections des différentes variantes en place au fil des années sont perceptibles.
Nous retrouvons avec joie la belle portion de sentier qui relie Boscaiöu et Somprei, même si elle est encombrée de branchettes de mélèzes et d’arbres tombés.
Petite pause, non pas pour la fatigue, mais pour la photo.
Parvenus à Boscaiöu, nous innovons encore et au lieu de partir vers les cassine di Catto, nous suivons une large piste qui nous amènera à notre point de départ, en passant par Ciòss.
Le petit hameau de Ciòss.
Un peu après Ciòss, une autre stèle se trouve sur le bord du chemin.
Note : si nous les photographions, ce n’est pas dans un esprit morbide, mais plutôt afin de prolonger la mémoire des personnes pour lesquelles ces stèles ont été dressées. Celle-ci célèbre la mémoire d’un pilote de chasse de l’armée suisse, le premier lieutenant Jürg Schoberth, décédé dans un accident d’avion – un Hawker Hunter, lors de l’approche de l’aéroport d’Ambri.
Lorsque nous arrivons à Lurengo, le vrombissement des motos, dans la vallée est toujours audible. Sur le parking, deux voitures se sont ajoutées aux cinq de ce matin.
Faune du jour
Une guêpe, construisant son nid.
Flore du jour
Identification non validée.






Itinéraire du jour
C’est ici et c’est chez Suisse Mobile.
Autoportraits du jour
A Chièra, où nous avons vainement attendu le soleil.
Lors de la descente, sur le beau sentier qui mène à Somprei.