Ásbyrgi et l’empreinte du sabot de Sleipnir

Nous transumons de Möðrudalur à Mývatn avec un petit détour par les chutes Dettifoss et Ásbyrgi. La journée est placée sous le signe de la pluie. Pluie qui nous contraint à renoncer à la randonnée prévue à Ásbyrgi. Qu’importe, car mère Nature, très certainement pour se faire pardonner, nous gratifie d’une magnifique aurore boréale.

Nous laissons derrière nous Möðrudalur. Il fait si froid que Stefano a enfilé des chaussettes avec ces Keens. Sans parler des gants, qu’il enlèvera bientôt, car notre « char » dispose d’un volant chauffant. En plus des sièges, que j’utilise à outrance depuis le début de notre voyage !

Dettifoss

Nous laissons la route n°1 pour partir franchement au nord, en ligne droite, en direction de Ásbyrgi. Une trentaine de kilomètres plus loin, un parking et une longue rangée de toilettes sèches marquent l’arrêt pour aller découvrir une chute d’eau (tiens, ça faisait longtemps !) : Dettifoss.

Un touriste averti en valant deux, nous nous équipons en fonction de ce que l’horizon nous révèle : un ciel bas, de la brume, qui pourrait ressembler à de la pluie ou à des embruns. Luana joue la carte Joker.

Eh oui, il pleut.

Comme toutes les grandes chutes d’eau que nous avons pu voir, le bruit est assourdissant. Son débit est de 193 m3 par seconde. Sachant que le volume exigé d’une piscine olympique de 2 mètres de profondeur est de 2’500 m3, il faut un peu moins de 13 seconde pour en remplir une. 277 piscines remplies en 1 heure.

Nous sommes trempés en moins de temps qu’il ne faut pour l’écrire. Ce qui ne nous aurait pas empêché d’aller nous balader sur ce petit sentier, en contrebas, s’il n’était pas fermé.

Nous ne sommes pas les seuls fous dehors.

Voici à quoi ressemble la vie derrière une paire de lunettes !

Nous remontons le fleuve sur quelques centaines de mètres pour aller voir une autre chute, qui, si moins imposante que la première, a le mérite d’offrir un bon recul et une belle visibilité.

Ces deux chutes sont alimentées par la rivière Jökulsá á Fjöllum – signifiant « la rivière glaciaire des montagnes » – qui elle-même s’alimente de la fonte du glacier Vatnajökull, le glacier le plus grand d’Europe. En d’autres termes, Dettifoss est la chute d’eau de tous les superlatifs. Y compris celui de l’humidité. La rivière, une des plus grandes de l’île, se jette ensuite en mer du Groenland.

En une année, elle charrie 500’000 tonnes de débris.

Revenus à la voiture, Luana nous offre un pique-nique dont elle seule a le secret. La conjoncture de la météo peu propice à des longues randonnées et des pique-niques improvisés fait que nous risquons bien rentrer avec 4 des 5 kgs de barres Clif emportées !!!

Autportraits du lieu

La fine équipe !

Allez, encore une. Ce ne sont pas les meilleures conditions pour une visite mais nous rions pour un oui ou pour un non. L’humeur est à la franche rigolade.

La pluie s’est un peu calmée.

Ásbyrgi

Pendant que nous roulons, Luana nous lit la légende d’Odin, dieu principal du panthéon de la mythologie nordique. Pourquoi Odin, me direz-vous ? Car avant de voir la trace laissée par un des huit sabots de Sleipnir, le cheval fabuleux d’Odin, il faut quand même que nous en connaissions l’histoire. Enfin, une petite partie, le minimum syndical.

Et puis ça fait passer le temps. La route est monotone, où plutôt la pluie discontinue rend la route monotone. Aujourd’hui devait être une journée consacrée à la randonnée. Nous en consacrons une partie à une sieste, garés au fond du parking du visitor centor d’Ásbyrgi.

Odin, dieu des morts, de la victoire et du savoir ne nous gratifie pas d’un miracle lorsque nous sortons de notre torpeur. Le ciel est égal à lui-même. Nous passons une petite heure à visiter le visitor center, visite que nous terminons par un bon café chaud. Lorsque nous ressortons, le ciel n’est plus aussi sombre.

Mais qu’y-a-t-il à voir ici, à Ásbyrgi ? Une gorge en forme de fer à cheval. Avec, à la pointe sud, une cascade dont il ne reste qu’un petit filet d’eau et un lac, Botnstjörn. Certains disent que ce cirque fut creusé par la fameuse rivière Jökulsá á Fjöllum. D’autres, l’attribue à Sleipnir, qui, par mégarde, s’approcha trop de la Terre et y laissa son empreinte. Empreinte de 1 km de large et 3.5 km de long. Je vous laisse imaginer la taille de cheval.

D’origine aquatique ou équine, cette zone, protégée entre de hautes falaises, constitue un habitat privilégié pour une avifaune variée ainsi qu’une forêt de saules et de bouleaux.

Nous aurions dû commencer notre randonnée du jour non loin du visitor center. Nous aurions parcouru, en longeant la falaise par le haut, toute la longueur de cirque pour arriver au-dessus du petit lac. Et retour.

Si pour moi la pluie ne constitue qu’un paramètre à gérer, elle est rédhibitoire pour Luana et Stefano. Nous optons donc pour le mode touriste frileux et fainéant et partons nous garer au parking au bout du cirque, proche du petit lac.

Un petit sentier part en zigzagant dans les arbres. Nos jambes apprécient ce petit épisode de marche. La pluie a cessé, même si l’atmosphère reste humide et fraîche.

Botnstjörn. C’est véritablement un tout petit lac, que je qualifierais presque d’étang. Dire que l’énorme rivière Jökulsá á Fjöllum coulait ici même ! La cascade, dont on devine l’emplacement, n’est effectivement plus qu’un petit filet d’eau.

Nous contournons le lac qui épouse la forme du cirque.

Seuls 350 mètres séparent, à vol d’oiseau, le parking du lac. Néanmoins, le sentier va et vient, remonte, descend, et s’assure que tout un chacun puisse apprécier la forêt environnante et admirer le meilleur profil du petit lac. Heureux d’être au grand air, et surtout au sec, nous n’omettons aucune bifurcation pour être certains d’avoir couvert toutes les options.

D’autant que la nature nous offre quelques friandises. Au grand dam de Luana qui déteste l’idée de nous voir manger des « choses » ramassées au bord du chemin.

Ásbyrgi, c’est également la capitale des Huldufólk, les hidden people, ces petits êtres amicaux qui vivent cachés. A ne pas confondre avec les trolls, qui eux, sont plutôt des géants maléfiques.

Le relief particulier de Ásbyrgi est propice à l’imagination. Une des légendes du coin raconte qu’un petit berger était amoureux de la fille du propriétaire. Bien évidemment, le mariage était impossible. Il fit un rêve où une fée lui racontait que son amoureux avait été transformé en monstre par un habitant maléfique des falaises. Le monstre vivait dans le petit lac et ne remontait à la surface qu’une fois par jour, lorsque le soleil de minuit illuminait les falaises d’une lumière dorée. Le sort pouvait être brisé à condition de lui jeter ce que les jeunes avaient de plus précieux. En retour, la fée leur promit le mariage. Ils vécurent ainsi heureux et eurent beaucoup d’enfants.

Non, ce n’est pas le nom d’un lieu. útsýnisstaður, ça veut tout simplement dire « point de vue ».

Ayant parcouru chaque mètre du sentier, nous repartons vers la voiture. Il est 16h30. Nous nous mettons en route pour la dernière partie du voyage. Notre ultime destination est la guesthouse Stöng, à l’ouest de Mývatn, un lac volcanique.

Stöng est également une exploitation agricole qui offre des services hoteliers. Elle produit de la viande et des légumes qui sont utilisés pour préparer les plats du restaurant.

Restaurant où nous dinons d’ailleurs, Stöng étant un petit peu loin de tout. Luana, qui traque sur une appli dédiée les prévisions des aurores boréales me convainc de l’accompagner dehors un moment. Le ciel est légèrement nuageux et la lune, encore basse à l’horizon, nous fait face. Luana me montre du doigt une trainée blanchâtre. Sceptique j’observe, et nous concluons que ce n’est que la lumière de la lune dispersée par les nuages. Nous nous apprêtons à rentrer, faisant demi-tour pour pénétrer dans le bâtiment. Et là, stupeur… Surprise… Le ciel est teint d’une vapeur verte gracile et mouvante. Mais, mais, c’est une aurore boréale ! Une magnifique aurore boréale, même ! Je me dépêche d’aller chercher Stefano. Nous voyant pointer du doigt le ciel, nous agiter et sauter sur place de joie et d’excitation, les convives du restaurant sortent à leur tour.

Nous sommes tellement émerveillés que nous ne prendrons que très peu de photos.

En allant nous coucher, Luana m’avouera qu’elle a versé une larme. Nous aussi étions très émus. Je m’endors avec ces belles images en tête.

Autoportraits du lieu

Je vous laisse apprécier la superposition des couches de vêtements.

Au-dessus du lac Botnstjörn.

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À propos de Marie-Catherine

Randonneuse, blogueuse et photographe amateur chez Two Swiss Hikers.

En phase de préparation de voyage, je m'occupe du choix voire de l'achat du matos et organise les bagages. Ma principale activité consiste à me réjouir des vacances qui arrivent ! Je deviens plus active au retour : il faut trier les photos (et des photos, il y en a...) et rédiger les billets de ce blog.

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